LA SOCIETE CIVILE


OBJECTIFS

  1. La distinction entre société (ou classe) politique et société civile est connue.

  2. L'importance d'une société civile active pour la démocratie est comprise.

  3. L'importance de la société civile dans la promotion des causes d'utilité publique et générale est comprise. 

 

CONTENU

  1. La composition de la Société Civile : toutes les structures en principe non politiques, agissant dans le domaine public et dans les secteurs entièrement ou partiellement d'utilité publique : ONG, communautés religieuses, groupes d'intérêts, associations diverses.

  2. Les domaines ou causes d'utilité publique (par exemple : L' école, la transparence des Elections, etc.)

  3. Le rôle de pression et de contrôle social, par exemple : 
    • Le rôle de l' Association des parents d'élèves dans une gestion transparente de l' école.
    • Cas des observateurs de la société civile lors des opérations électorales.



SUGGESTION

Au niveau du contenu, l'animateur s'efforcera de prendre quelques articles de journaux fonction des préoccupations du milieu.

Matériels didactiques

Texte 1

" Le réseau béninois des ONG pour les élections transparentes et pacifiques"

L' EXPERIENCE DU RESEAU BENINOIS DES O.N.G. POUR

DES ELECTIONS PACIFIQUES ET TRANSPARENTES :

EXEMPLE D' EDUCATION CIVIQUE

Par Adolphe Codjo Kpatchavi

1- Problématique : L' éducation civique pour le développement : une option du Centre afrika Obota

Le Centre Afrika Obota est une organisation Non Gouvernementale créée en octobre 1989 à Cotonou. C'est une association à vocation panafricaine qui s'occupe de la recherche et du développement.

L' histoire de ce centre remonte au constat d' échec des trente ans d'indépendance en Afrique, constat fait par des ressortissants de plusieurs nationalités réunis à Cotonou en octobre 1989 et qui ont pris la décision de réfléchir à une nouvelle stratégie.

Les diagnostics révélaient la nécessité de reposer les question de développement.

C'est dans cette optique que l' éducation civique avait été perçue par le Centre Afrika Obota (CAO) comme une option pouvant induire des changements qualitatifs de l' homme africain afin qu'il devienne acteur responsable du développement.

Pour faire rayonner cette vision de l' éducation civique pour le développement, le CAO n'est jamais resté indifférent aux questions touchant la vie publique ou à celles relatives au renforcement du processus démocratique en cours. C'est dans ce contexte que nous pouvons situer l'initiative du Réseau Béninois des ONG pour des Elections Pacifiques et Transparentes en janvier 1995.

Les élections législatives de 1995 : un défi à relever

L' année 1995 a été marquée au Bénin par un événement politique majeur. Il s' agit des élections législatives qui mettaient ainsi fin à la première expérience des législatives sous l'aire du renouveau démocratique. Comme nous le savons, les élections constituent un acte important dans tout système démocratique.

L' heureux aboutissent de la Conférence Nationale béninoise et le climat politique qui ont caractérisé les quatre (4) années d'existence de nos institutions ont amené à considérer les élections de 1995 comme un test de maturité du peuple béninois et une étape très préoccupante qu'il convenait de franchir dans la sécurité.

Pour contribuer alors aux côtés des autres forces de la société civile à démentir l' idée qu'en Afrique, la démocratie n'est pas contre-indiquée et que le système démocratique mutlipartite ne débouche pas nécessairement sur des actes de vandalisme, de violence, d'émeutes et de guerre civile, le CAO avait engagé une série d'actions et de concertation à l'endroit des ONG et organismes qui agissent sur le territoire afin de créer une force neutre de la société civile qui aura pour mission de veiller au déroulement pacifique des élections et de garantir la transparente des résultats.

II- Le contexte socio-politique d' émergence du Réseau béninois des ONG pour des élections pacifiques et  transparentes.

A- L' insécurité sur le plan géologique.

Le Bénin est passé d'un régime militaro-marxiste à un régime démocratique sans bain de sang. L' insécurité sociale s'est installée dans nombre de pays après la Conférence nationale ou après les élections. Le cas du Togo, du Libéria, du Niger et du Mali, etc. Où les foyers de tension sont allumés, étaient des exemples que confirme la thèse selon laquelle les Africains ne sont pas mûrs pour la démocratie. La peur de la contagion de ces événements malheureux liés essentiellement au régionalisme, au refus de restitution du pouvoir et à la course effrénée aux postes politiques étaient vive dans les esprits. Pendant les quatre (4) années de renouveau démocratique, la population était hantée par cette peur chaque fois que les dérapages s'observaient au niveau des institution de l' Etat, des partis politiques ou organisations de la société civile.

Aussi, les difficultés créées par la dévaluation du franc CFA et les prises de positions politiques qui s'en étaient suivies étaient des facteurs de désillusion qui ont fragilisé depuis janvier 1994 les acquis du renouveau démocratique au Bénin. Les élections dans ce contexte peuvent vite se mouvoir en goutte d'eau qui pourrait faire déborder la vase et le mettre au rang des pays qui donnent la preuve de la "conte-indication" de la démocratie.

B- La situation nationale

- Les souvenirs des événements des présidentielles de 1991

Le Bénin a failli être plongé dans une guerre civile lors des élections présidentielles de 1991. En pleine élection, un conflit avait éclaté au Nord entre les ressortissants du Sud et ceux du Nord avec son cortège de violence et chasse aux populations ressortissant du Sud à cause de l' opposition de deux candidats en lice : l' un du Nord et l'autre du Sud. Après plusieurs concertation, le Bénin a pu, de façon stratégique, gérer cette situation en appelant les citoyens à un sentiment de patriotisme. Le désastre a été ainsi évité.

Ainsi, le climat social créé par les hommes politiques pendant les derniers mois de législatives avait ressuscité ces malheureux événements et a créé la psychose au niveau de l' imaginaire social.

- Les conflits entre le législatif et l'exécutif pendant la première législature

Le vœu du président de la République d'avoir une majorité à l' Assemblée Nationale pour conduire ses actions gouvernementales ne s'est pas réalisé ipso facto. L'extrême mobilité des groupes parlementaires était un casse-tête pour l' Exécutif face à une opposition plus ou moins organisée, mais qui développait toute une stratégie de blocage des actions gouvernementales. Ceci s'est observé à maintes reprises.

Les retombés se faisaient sentir au niveau des populations. Ainsi, les querelles de personnes, des règlements de compte, le dénigrement, l'intoxication, étaient devenus la règle du jeu politique. La politique politicienne a pris le pas sur les convictions politiques.

Les prises de positons avec la manipulation des populations laissaient prévoir une imminente explosion sociale.

- La polémique autour de la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA)

La gestion des élections par le Ministère de l' intérieur n'inspirait plus confiance.

L' expérience de 1991 en est une illustration éloquente. Les partis de l' opposition vont saisir
Cette opportunité pour exiger la création d'une Commission Electorale Nationale Autonome pour la conduite des opérations électorales de 1995. L' idée a été introduite au niveau de l' Assemblée Nationale.

Le président de la République, devenu chef de parti et le ministre de l' intérieur, chef d'un parti de mouvance présidentielle n'entendaient pas que cette commission soit mise en place au risque d' ôter au ministère de l' intérieur, les prérogatives liées au contrôle des élections.

La guerre fut alors déclarée entre l' Exécutif et le législatif à ce sujet.

Malgré les prises de positions et la réticence des uns et des autres, cette commission finira par voir le jour à deux mois des élections. Produit de crise dont les membres étaient désignés par les deux institutions, il lui faudra gérer dès sa naissance, les rapports avec l' Exécutif qui avait le nerf de la guerre, c'est-à-dire, l'argent pour l'organisation des élections.

Face à tous ces indices qui auguraient des troubles pendant les élections, la Fondation Konrad Adenauer et le Centre Afrika Obota se sont concertés sur la question. Après réflexion, la décision avaient été prise de convoquer le 30 janvier 1995 une table ronde de concertation des ONG pour réfléchir sur la conduite à tenir face à cette situation.

C- La table ronde de concertation des ONG le 30 janvier 1995 : naissance du Réseau

Une observation attentive des activités des associations de la société civile permet de faire deux constats :

- plusieurs ONG nationale et internationale apportent déjà leur contribution au Bénin dans le cadre du renforcement du processus démocratique ;

- les actions de ces ONG relèvent d'initiatives isolées et certaines associations de la société civile font ou envisagent les mêmes choses pour les mêmes groupes cibles.

Vu ces constats, la table ronde envisagée par le CAO visait à créer un cadre de concertation pour lesdites associations afin qu' elles échangent leurs perspectives, leurs projets et programmes dans le cadre des élections de mars 1995. Ceci permettrait d'éviter le gaspillage des ressources humaines, matérielles et financières préjudiciables aussi bien pour l'ensemble des populations béninoises que pour les associations. Un réseau supranational d'associations capables de constituer un autre contrepoids face à toutes les forces politiques en lice a été créé.

A l' appel lancé par le CAO, seize associations ont répondu. Il s'agit de :

- Association Béninoise des Usagers de Services (ABUS) ;

- Africa Culture ;

- Association Nationale d' Appui pour le Peuple (ANAP) ;

- Centre Afrika Obota (CAO) ;

- Centre Béninois des Droits de l' Homme (CBDH) ;

- Conscience Civique ;

- Commission Béninoise des Droits de l' Homme ;

- Nouvelle Ethique ;

- Institut des Droits de l' Homme ;

- Fondation Konrad Adenauer ;

- Groupe d' Etude et de Recherche pour la Démocratie et le Développement Economique et Sociale (GERDDES) ;

- Ligue Islamique des droits de l' Homme ;


- Association Nationale de la Solidarité (ANS) ;

- Cercle d' Etude et de Recherche pour le Développement (CERD) ;

- Cercle de Recherche et Initiative Civique ( CRIC) ;

- National Democratic Institution.

A l' issue des travaux, les participants à cette table ronde ont exprimé leur conviction que :

1- Les élections pacifiques et transparentes constituent un gage de promotion de la démocratie ;

2- Les prochaines échéances électorales contribueront par conséquent au renforcement du processus démocratique au Bénin.

Ainsi, les associations et ONG présentes à cette rencontre, après analyse des déclarations et prises de positions des hommes politiques au Bénin en cette période préélectorale constatent qu'il y a quelques appréhensions quant au déroulement normal et régulier des prochaines élections et se refusent de jouer plus tard aux sapeurs-pompiers, aux humanistes qui n'auraient rien fait pour éviter l'incendie. C'est ainsi que le Réseau Béninois des ONG pour des Elections pacifiques et Transparentes a été créé.

Doté d'un bureau de cinq (5) membres, il est chargé de coordonner les activités ou actions envisagées et de représenter le pôle de la société civile en vue d'assurer les élections fondées sur le respect strict de la loi, la non-violence, l'acceptation par tous les candidats d'une compétition loyale, la lutte contre les pratiques d'achat de consciences et les débats d'idées autour des programmes d'actions.

A cet effet, des appels ont été lancés à toutes les institutions de l' Etat, à la Commission Electorale Nationale Autonome, à la classe politique béninoise et à tous les citoyens afin que chacun à son niveau exécute les tâches qui lui sont imparties dans le strict respect des lois en vigueur et des principes républicains pour que les élections se déroulent dans le calme et la dignité.

III- Stratégies et différentes formes d'actions

A- La Philosophie du réseau

L' objectif principal des associations et ONG membres du Réseau était de relever un double défi :

- défi de la capacité et de la nécessité d'organisation de la société civile au Bénin pour défendre à travers ces élections les acquis du renouveau démocratique. Il faut prouver la maturité des Africains à prendre en charge leur destinée sans recourir nécessairement aux forces étrangères ;

- défi de crédibilité et de neutralité pour faire du Réseau une force arbitre et digne, un contrepoids de recours au sein de la société civile qui pourrait favoriser l' émergence d'une opinion capable de s'imposer comme référence sur le plan national et international.

Chaque association et ONG avaient pour mission d'amener ses membres à adhérer à la philosophie du réseau, à s'engager pour la réalisation des objectifs fixés en mettant à sa disposition les ressources intellectuelles, humaines et financières.

C'est à partir de cet accord d' adhésion et d'engagement que plusieurs actions seront engagées à savoir :
- la sensibilisation ;

- la formation des observateurs informels et membres des bureaux de vote ;

- l'observation des élections

- le décompte parallèle.

B- Stratégies

I – Institutionnalisation du réseau

Les élections constituent un événement national majeur et on saurait dans le cas d'espèce, engager des actions sans s'inscrire dans la logique de la légalité. Au lendemain de la création du Réseau des lettres de notification avaient été envoyées aux autorités du Ministère de l'intérieur et de la Commission Electorale Nationale Autonome. L' initiative avait été appréciée surtout par la CENA qui, à travers une lettre d'accréditation, avait exprimé sa disponibilité à collaborer avec le Réseau.

2- Les ressources humaines, financières et matérielles

- Ressources humaines

Chaque association devrait mettre à la disposition du Réseau les compétences nécessaires pour la conduite des opérations. Une séance de travail s' était tenue à cet effet avec les responsables, personnes ressources et membres de toutes les associations pour régler le problème de disponibilité et d'engagement pour les actions à mener.

- Ressources financières

Dans la même logique, chaque association devait mettre à contribution du Réseau, les moyens nécessaires à partir de ses propres fonds par cotisation ou en faisant recours à ses partenaires pour contribuer financièrement aux actions à mener

- Ressources matérielles

Les outils de travail tels que les micro-ordinateurs, les moyens de déplacement, de télécommunication, les locaux qui ont favorisé les différentes activités, le matériel électoral pour les séances de simulation, etc. Ont été mis à la disposition du réseau par chaque association et autres organismes pour soutenir les activités.

C-  Les différentes formes d'actions

I- La sensibilisation

Un travail préalable avait déjà été fait par le CAO en direction des journalistes béninois surtout en langues nationales. C'est le séminaire sur le thème : " Les élections pour la paix et le développement : rôles et responsabilités des journalistes en langues nationales".

Il avait été question de réfléchir sur le rôle des médias et des responsabilités du journaliste en période électorale dans un pays comme le Bénin à près de 80 % d'analphabètes.

Ce travail de recyclage et de sensibilisation des communicateurs a été mis en service des activités du Réseau dans ses actions de sensibilisation a beaucoup utilisé la stratégie des groupes multiplicateurs. Ainsi, quatre (4) catégories sociales avaient été identifiées et c'est envers eux que le travail a été effectué. Il s' agit des journalistes, des élèves et étudiants, des agents des services publics et de l'administration et enfin les partis politiques.

L' objectif à atteindre était la couverture de tous les six départements du Bénin pendant toute la période des campagnes électorales. Les supports utilisés étaient les affiches publicitaires, des prospectus et le code électoral. Ces affiches et prospectus renseignent sur les comportements que le citoyen doit tenir pendant le déroulement du scrutin. Il a été procédé aussi à la vulgarisation du code électoral.

Ainsi, des équipes ont été formées pour sillonner ces six départements pour rencontrer et discuter avec les groupes cibles. A l'issue des séances de travail, des lots d'affiches et de prospectus étaient distribués aux participants. Les déclarations et messages médiatisés venaient compléter cette gamme de séances d'information.

2- La formation

D' une manière générale, les élections en Afrique se déroulent sous le supervision des observateurs internationaux. L' influence de ces derniers reste très limitée quant à l' issue de ces élections par les observateurs nationaux informels. Une formation s'avère nécessaire pour ces derniers. Il en est de même pour tous les citoyens impliqués dans l' organisation des opérations de vote. Dans le cas d'espèce, il s' agit de renforcer la capacité des citoyens à assumer leur devoir civique en tant qu' électeur et garants de la transparence et de l' éthique du jeu électoral.

Les bénéficiaires de ces formations sont des citoyens béninois intéressé par les élections et qui seront disponibles sur toute la période du déroulement des élections jusqu'à la proclamation définitive des résultats. Ils sont envoyés par les partis et toute autre association nationale après un appel d'offre du Réseau.

Près de trois cents observateurs nationaux ont été formés en deux jours à travers tous les six départements de notre pays. La coordination de cette formation est assurée par une équipe composée d'un consultant, d'un coordonnateur national, d'un coordonnateur national adjoint, d'un secrétaire et de trois (3) équipes de formateurs composés de quatre (4) membres.

Cette formation était faite d'exposé-débats et de jeux de rôles et de simulations, ce qui a permis de les familiariser aux différentes techniques d'observation, aux comportements à tenir le jour du scrutin et surtout à l' utilisation du matériel électoral. Nous avions ainsi joué le rôle de relais pour la Commission Electorale Nationale Autonome.

3- L' observation

L' observation des élections a été l'une des actions les plus décisives du Réseau. Les personnes formées devaient se rendre dans chacune des 18 circonscriptions du pays. Très tôt, le jour des élections, les observateurs avaient pour mission de sillonner le maximum ou tous les bureaux de vote de leurs circonscriptions pour observer, noter et témoigner.

Les outils de collecte des données étaient des grilles d'observation à cocher et des fiches. Les grilles avaient été utilisées dans la journée et la collecte des suffrages a commencé après la tombée des résultats soit au bureau de vote, soit au siège de la Commission Electorale Locale ou Départementale.

4- Le décompte parallèle

Cette opération a consisté à collecter les suffrages exprimés dans tous les bureaux de vote des 18 circonscriptions électorales du Bénin, à les dépouiller et à les traiter afin d'obtenir des résultats à comparer avec ceux de la CENA, structure compétente.

En effet, l' idée de décompte parallèle n'était pas claire dans les objectifs généraux que le réseau s' était fixés au départ. Le décompte parallèle s'est imposé en cours d'opération par le fait que les observation ne pourraient pas suffire pour crédibiliser les résultats de la CENA et de la Cour Constitutionnelle, ce qui permettrait de positionner le Réseau comme une force de la société civile neutre, mais capable de juger ou de se prononcer sur la validité des résultats face à l'opinion internationale.

C'était l'opération la plus coûteuse de par le système mis en place pour la collecte des données et l' organisation technique de leur traitement jusqu'à la proclamation des résultats.

- Le personnel de cette opération

Les observateurs et les collecteurs des résultats

Les premiers sont des membres du réseau qui ont participé à l'observation et qui, après fermeture des bureaux de vote sont chargés de collecter les résultats. Les seconds sont des personnes identifiées par les responsables du Réseau et qui devaient prendre les résultats et les communiquer le plus tôt à des bases centrales pour les équipes qui s'occupent du traitement. Il y avait près d'une centaine d'observateurs et près de deux cents collecteurs disséminés sur toute l'étendue du territoire national.

Pour la collecte des données, les fiches imprimées avaient été conçues sur lesquelles on pouvait cocher les suffrages par parti et quelques autres renseignements relatifs au bureau.

Les résultats étaient collectés à un double niveau :

- les bureaux de vote ;

- les sièges des Commissions Electorales Locales ou Départementales.

Ceci permettrait de voir la concordance entre les chiffres du terrain et ceux véhiculés vers les sièges de commissions. Ensuite, ces résultats sont véhiculés par téléphone, fax ou un moyen de déplacement vers les bases de traitements.

Les équipes de saisie des résultats

Une cinquantaine de personnes ayant une connaissance de l' utilisation de l'outil informatique avaient été formées pour la saisie des résultats. Elles avaient au préalable été familiarisées à la saisie de la liste électorale, aux noms et numéros des bureaux de vote.

Répartis en des équipes de trois ou quatre, elles étaient basées dans des endroits précis équipés d'un micro-ordinateur et d'une ligne téléphonique qui les mettaient en contact avec une équipe d'observateurs se trouvant dans une circonscription électorale.

L' équipe de coordination

Elle était le cerveau de l' opération. Il s'agit de quatre personnes, statisticiens et techniciens en informatique. Ce sont eux qui supervisaient les opérations sur le terrain en mettant en contact les petites bases avec la base centrale, ce qui permettait de dégager les tendances au niveau de chaque circonscription.

C'est cette équipe qui va finaliser les travaux de compilation et de calcul des suffrages et donner les résultats définitifs.

IV- Le Réseau face aux institutions de l' Etat et aux Organismes Internationaux

A- Le Réseau face à la CENA

Avec les structures décentralisées de la CENA comme la Commission Electorale locale (CEL) ou la Commission Electorale Départementale (CED), les rapports ont connu des hauts et des bas.

Pour la collecte des données au niveau de certaines circonscriptions électorales, il y a eu des accrochages où certains membres de la CED, de la CEL ou de la CENA se sont opposés à la collecte des opérations, ce qui a fait que les résultats de certains bureaux de vote n'ont pas été donnés à temps. Ailleurs, les choses se sont bien passées et les résultats ont été obtenus.

B- Les résultats obtenus

L'objectif que le Réseau s'était fixé en déclenchant l'opération est la proclamation des résultats 24 heures après les élections, mais cela n'a pas été le cas. Il a fallu trois à quatre jours pour que tous les résultats nous parviennent. Et c'est cinq jours après que les résultats avaient été obtenus alors que rien ne filtrait encore au niveau de la CENA et de la Cour Constitutionnelle. Il fallait attendre encore trois jours, soit huit jours après les élections.

Au niveau des observations, les irrégularités observées avaient été notées et portaient sur des fraudes, l'incompétence notoire de certains agents des bureaux de vote.

Disposition pratiques

Le Réseau s'était interdit de divulguer les résultats dans les organes de Presse. Toutes les pressions reçues des partis ou des organes de presse étaient vouées à l' échec. Cependant, des copies confidentielles avaient été envoyées à la CENA, au Ministère de l'intérieur, à la Cour Constitutionnelle, à certaines Ambassades comme celles du Ghana, de la France, des Etats-Unis, du Danemark, du Zaïre, de l' Allemagne et à certaines fondations comme les Fondation Konrad Adenauer, Hanns Seidel, Frieddch Naumann, Fiedrich Ebert, etc.

V- Expérience du Réseau : leçons d'éducation civique et perspectives

Quelles leçons d'éducation civique peut-on tirer de cette expérience ?

Au niveau des organisations de la société civile membres du Réseau, le capital de mobilisation, d'engagement et de motivation pour des actions d'utilité publique pour garantir la paix et la transparence des élections, bref, pour renforcer le système démocratique sans être mu par des intérêts particuliers est un acquis à mettre au service de l' éducation civique.

Ceci montre la détermination des associations de la société civile à s'imposer en toute légitimité et en toute légalité comme force de recours à la base.

Il y a eu du désintéressement et surtout du sacrifice, car, à aucun moment, la question de perdiem, de rémunération, de condition, de conditions de logement et de déplacement rie s'est posée.

Nous n'avions pas eu des 4 X 4 ou des pajeros avant de nous rendre dans des milieux à accès difficile et situés à 400 ou à plus de 700 km de Cotonou, notre base. Nous avions même dormi dans des bureaux de vote et passé des nuits blanches pour collecter les résultats. 

Cet esprit de dévouement et de courage qui a permis de s'imposer à la population et aux institutions de notre pays et à l'opinion internationale est un acte civique qui a rendu crédibles les actions du Réseau.

Au niveau des populations, les résultats ont été concluants. Les équipes de sensibilisation et de formation ont pu faire le tour des six département du Bénin.

Les affiches apposées sur les murs, les portes, dans les écoles, les bureaux de vote, les informations apportées sur les comportements à adopter pendant la période électorale, les références faites aux sanctions qui découleraient du non-respect des textes en vigueur, ont permis au Réseau d'ajouter quelque chose au sens civique des Béninois.

C'est dire donc que l'objectif d'éducation civique a été atteint.

Par ailleurs, face aux institutions de l' Etat, à la classe politique et à l'opinion internationale, le Réseau a joué un rôle de contrôle social, car son influence dans l'arène politique en tant qu force diffuse a permis aux organes accrédités de l' Etat pour l'organisation des élections, de faire preuve de sérieux et de patriotisme dans le travail abattu.

L'expérience du Réseau béninois des ONG pour des Elections Pacifiques et Transparentes a montré la nécessité et la capacité d'organisation de la société civile en tant que contrepoids dans le renforcement du processus démocratique en Afrique. La mobilisation des ressources par les partenaires du Réseau, la neutralité observée face aux actions engagées et menées ont influencé les élections législatives du 28 mars 1995 qui se sont, contrairement à ce que l'on pensait, déroulées dans la paix et la transparence.

Les résultats ont été invalides dans deux circonscriptions électorale (Cotonou, Parkou) par la Cour Constitutionnelle à cause de certaines irrégularités. C'était une décision salutaire pour le Bénin surtout après la période post-électorale. Les procès-verbaux du Réseau avaient déjà fait mention de ces irrégularités.

A la reprise des élections dans ces deux circonscriptions, électorales (Cotonou, Parakou) par la Cour Constitutionnelle à cause de certaines irrégularités. C'était une décision salutaire pour le Bénin surtout après la période post-électorale. Les procès-verbaux du Réseau avaient déjà fait mention de ces irrégularités.

Cependant, il faut avouer que cette opération a coûté cher aux associations du Réseau, mais sûrement moins cher que le coût d'une guerre qui se serait déclenchée, qui mettait en danger des vies humaines et mobiliseraient des milliards au niveau des humanistes internationaux. C'est dire donc que le coût de cette opération vaut moins que les résultats obtenus. Et si les ressources humaines ont être trouvées sur place, il n'en est pas de même pour les ressources financières qui ont été à 90 %, obtenues des organismes étrangers.

Cette dépendance vis à vis de l'extérieur qui peut fragiliser l'expérience est à craindre pour l'avenir afin que les canaux de financement des actions d'utilité publique de la société civile soient identifié au niveau national ou régional.

Ce cadre, à mon avis, est très indiqué réfléchir à cette stratégie de mise en œuvre des efforts de la société civile sur le plan régionale pour le renforcement du processus démocratique.
 

Texte 2

" L'expérience des initiatives de Citoyens en Allemagne

et leur contribution à la démocratie"

par Volker Mönikes

1. Remarques introductives

Avant de commencer mon discours, j'aimerais faire quelques remarques concernant mon rôle et concernant le thème.

Aujourd'hui je ne parle pas comme Représentant d'une fondation comme ça a été le cas pendant la cérémonie d'ouverture, mais je vous parle comme observateur du développement qui se déroule en Allemagne. Observer cette situation de loin facilite quelquefois l'abstraction, mais la compréhension est en même temps aggravée, parce que une vraie compréhension des processus sociaux ne peut être obtenue qu'en s'intégrant dans le processus lui-même. Le fait que j'ose quant même parler des initiatives de citoyens se justifie par ma participation personnelle, à la fin des années 70 et au début des années 80, à quelques initiatives de citoyens. Ça me facilite la description et aussi l'analyse.

J'aimerais ajouter que la perspective de mon intervention aujourd'hui est surtout une perspective allemande, parce qu'il me semble plus intéressant d'approfondir le cas de mon propre pays au lieu de rester superficiel au niveau de plusieurs pays. En plus, vous connaissez, par exemple, la France beaucoup mieux que moi, et il n'y a rien que je pourrais ajouter concernant ce pays.

Ceci dit, j'aimerais mentionner quelques aspects préliminaires, qui sont à la base de ma présentation.

Je suis convaincu, comme je l'ai dit dans mon discours d'ouverture, que la démocratie n'est jamais un fait accompli. J'aimerais donc plutôt parler de la démocratisation pour souligner le caractère procédural de la participation de la population au jeu politique. Néanmoins, il existe des résultats et des faits établis qui deviennent des faits de base pour le déroulement  de démocratisation et qui ne ne sont pas faciles à changer. Ce sont surtout les normes constitutionnelles définies dans la loi fondamentale. Ils doivent nécessairement servir comme aspect de référence dans tout le jeu politique, cela n'exclut pas des amendements de la constitution, mais le premier défi c'est de remplir les normes constitutionnelles avec une vie et une réalité constitutionnelle. C'est surtout l'interprétation de la constitution et sa pratique qui dirigent la plupart des débats politiques en Allemagne et aussi aux Etats Unis, c'est pas tellement le débat sur la constitution même. Ici il existe une grande différence entre les systèmes anglo-saxons qui quelquefois même existent sans une constitution écrite, je cite le cas de la Grande Bretagne, par rapport à la France, où une discussion permanent des bases constitutionnelles pour la démocratie est tout à fait normal.

Une deuxième remarque que j'aimerais faire c'est que l' Allemagne se trouve actuellement dans une phase, peut être pour la première fois dans l'histoire de la République, où elle doit montrer sa maturité démocratique. Pour la première fois après la guerre, nous avons en Allemagne une situation ou le développement politique et le développement socio-économique ne suivent plus le même rythme. Comme les dernières années ont, sur le plan politique, mené à un véritable élargissement de l'importance de l' Allemagne sur le plan international, avec l'entrée de l'ancien RDA dans le République Fédérale d' Allemagne, on note un renforcement des valeurs politiques et constitutionnelles dans mon pays, mais on constate aussi une énorme récession économique et beaucoup de problèmes sur le plan fiscal et économique ils sont aussi liés au grand défi d'intégrer cinq nouveaux états fédérés, qui étaient complètement détruits par l'incompétence et l'ignorance des socialistes. Le fait que l' Allemagne dans le concert des pays de la CEE n'est plus le pays le plus fort, mais qu'elle est devenue une force moyenne, a gravement touché aux potentialités économiques.

Surtout il a une influence sur la mentalité de la population allemande. Selon des chiffres globaux, l' Allemagne occupe aujourd'hui le septième rang au niveau de la productivité et des revenus par tête dans la communauté européenne. Ça n'a pas seulement inquiété les citoyens au niveau de la sécurité sociale, cela a aussi bouleversé l'attitude de beaucoup d'allemands vis à vis de la démocratie même.

A cette situation s'ajoute une autre particularité : l' Allemagne de l'Est a terminé un changement démocratique avec la première révolution couronnée de succès qui a eu lieu sur le terrain allemand, et cela sans violence. Voici une certaine similarité avec la situation au Bénin. Cette similarité va plus loin. Au Bénin, comme en Allemagne de l' Est la situation socio-économique et les attentes de la population pour un avenir meilleur sont des facteurs incompatibles à court terme. Ça a créé un certain nombre de frustrations au niveau de la population est-allemande qu'on doit considérer comme facteur très important pour le fonctionnement de la démocratie à l'avenir.

Nous nous trouvons donc dans une situation dans laquelle plusieurs conflits – le conflit entre l' Allemagne de l' Est et l' Allemagne de l' Ouest, le conflit entre valeurs politiques et valeurs socio-économiques – doivent être gérés en même temps. La naissance des tendances radicales de la droite et de la xénophobie doit aussi être interprétée par rapport à ces difficultés.

Néanmoins, je ne vais pas trop parler du développement récent après la réunification de l' Allemagne, parce que je crois que ce que j'ai à vous dire concernant les initiatives de citoyens peut beaucoup mieux être interprète en analysant la situation dans les années 60 à 80.

2. Définition

J' aimerais alors, dans un deuxième point, vous donner ma définition de ce que j'entends moi par une initiative de citoyens, il s'agit d'une définition surtout descriptive parce qu'il faut que je vous donne certains aspects assez concrets pour mieux vous faire comprendre ce que c'est chez nous.

On doit, c'est une première définition de manière négative, distinguer, les initiatives de citoyens des partis politiques, des groupes parlementaires et des groupes d'intérêt bien structurés, qui sont caractérisés par une longue tradition comme les syndicats, les associations des entrepreneurs, les associations professionnelles, etc. Les initiatives de citoyens sont des groupes et des mouvements, dans lesquels les citoyens prennent entre leurs mains eux-mêmes la réalisation des droits de base et la représentation directe de leurs intérêts sur le terrain. Les initiatives de citoyens font l'expérimentation avec de nouvelles formes d'organisation et ils essaient de lancer de nouveaux idéaux politiques dans le système établi. La spontanéité, l'autonomie et une influence directe sur les décisions politiques sont plus importants pour les animateurs des initiatives de citoyens que les aspects d'organisation et de la représentativité.

Ils se placent en dehors de la balance du pouvoir qui est institutionnellement et traditionnellement réglée, et ils essaient hors des parlements et de la bureaucratie de gagner

une influence directe sur les processus des décisions qui se font dans les parlements et dans l'administration.

Leur critique est dirigée, sur un plan formel, contre l'insuffisance des processus de décisions qui sont réglés par le principe de la majorité.

Sur le plan matériel, ils dénoncent la tendance des systèmes politiques établis de négliger ou oublier certaines sphères de la vie publique qui ont une directe importance pour la survie de la société même. Donc, leur attaque se dirige contre la tendance des partis politiques et d'autres acteurs dans la société de négliger certains aspects physiques, moraux ou sociaux, qui dans le processus d'industrialisation deviennent de plus en plus importants.

Il faut retenir, que les initiatives des citoyens ne sont pas partisanes des partis, elles travaillent en dehors des parlements et de l'administration traditionnellement établies, elles ne sont pas d'accord avec le système de représentation démocratique, surtout avec le principe de la majorité, et finalement, elles lancent de nouvelles idées et de nouveaux idéaux dans la discussion politique.

3. Histoire

Maintenant j'aimerais, à partir du développement historique en Allemagne, vous montrer qu'elle était la base réelle pour la naissance des initiatives de citoyens dans les années 60. Je veux vous montrer quelques raisons d'être pour les initiatives de citoyens et décrire les aspects les plus importants de leur fonctionnement.

Les initiatives de citoyens en Allemagne, dans le sens de la définition que je viens de vous donner, ont pour la première fois jouées un grand rôle après la fin de la reconstruction de l' Allemagne, donc à la fin du gouvernement Konrad Adenauer vers les années 63/64.

Les années 50 avaient établi une croissance forte sur le plan économique et un système politique très stable. Au début des années 60 la constitution allemande était acceptés par toutes les tendances politiques. Le fameux miracle allemand sur le plan économique était visible par tout le monde, il n' y avait pratiquement pas de chômage, il y avait une croissance économique permanente, les besoins et les attentes de la population étaient satisfaits à un très haut niveau

Sur le plan de la politique étrangère le conflit Est-Ouest donnait les conditions cadres pour se situer. Sur le plan de la politique intérieure il existait un système fédéral et parlementaire bien établi au niveau des communes, des états fédérés et de l' Etat fédéral. En plus, l' Etat de droit bien fonctionnant à tous les niveaux, était établi et donnait beaucoup de sécurité aux citoyens. La décentralisation du jeu politique avait donné une grande transparence des décisions primordiales en Allemagne. Pour la première fois dans leurs vies, la plupart des membres de la génération née avant ou pendant la guerre mondiale se trouvait dans un système libre et garantissant la liberté et la sécurité économique.

Les contre-pouvoirs avaient aussi trouvé leurs positions dans le système allemand. Les églises étaient intégrées par une structure de liaisons institutionnalisées avec l' Etat, le syndicat unique contribuait à une structure économique et sociale très équilibrée qui sous le thème "économie sociale de marché a trouvé entre temps un intérêt particulier partout dans le monde.

Surtout, on a créé un système de partis politiques qui permettait à tous les partis politiques de participer au pouvoir, dans les communes, les Etats fédérés et dans l' Etat fédéral. On savait s'arranger avec le système. Le grand parti d'opposition, le parti socialiste, avait au cours de son congrès de 1961 accepté les principes du système politique de la République Fédérale d' Allemagne et aussi son système économique, après qu'on avait, dans les années 50, fortement contesté l'intégration de l' Allemagne dans le système de l' OTAN. On avait contesté aussi la réintégration ou restructuration d'une armée allemande, et on a aussi fortement critiqué le système d'une économie de marché.

Après 1961 les socialistes avaient choisi une autre position et ils essayaient, participant dans les institutions importantes de l' Allemagne, de jouer un rôle plus constructif et plus positif au niveau de notre système politique. Les socialistes participaient au pouvoir, beaucoup de ministres-présidents de plusieurs Etats fédérés étaient des socialistes, les socialistes avaient une minorité qualifiée au niveau de plusieurs conseils audiovisuels dans les Etats fédéres. Beaucoup de juges de notre cour constitutionnelle et bien sûr aussi beaucoup de membres de la deuxième chambre de notre parlement, le Bundesrat, donc le parlement des Etats fédérés étaient socialistes. De cette manière l'opposition, au plan fédéral était intégrée dans le système politique et pouvait activement participer aux décisions prises à tous les niveaux.

On avait trouvé un système de financement des partis politiques qui les satisfaisait. Les députés avaient des conditions de travail et des conditions sociales qui les mettaient à l'aise, il semblait qu'un véritable consensus au niveau des citoyens et au niveau des partis politiques avait été trouvé.

L' Allemagne jouait un rôle important dans l' économie mondiale, tout le monde avait compris et accepté que l' Allemagne ne voulait pas, à cause de son histoire, jouer un grand rôle au niveau politique

Pour décrire cette situation au début des années 60, j'aimerais utiliser le terme de la "bureaucratisation de la démocratie". C'est à dire que le système politique était tellement bien établi que même les conflits entre les différentes tendances politiques se réglaient d'une manière bien structurée et moins conflictuelle au niveau des bureaucratie, parlementaires.

Entre temps, une nouvelle génération qui ne connaissait guère les difficultés de la guerre, qui n'était pas marquée par l' échec de la République de Weimar, se demandait d'une manière plus libre et plus ouverte si les valeurs établies pendant ta période d'après-guerre sont valables. Cette jeune génération commençait à jouer un rôle dans le système politique.

Pour cette génération, le consensus généralisé qu'on avait trouvé dans les années 50 n'était plus une condition sine qua non pour le fonctionnement de la démocratie, et en plus les grands conflits internationaux, le conflit nord-sud, le conflit est-ouest, n'étaient plus des faits acceptables pour elle

En plus, on commençait à voir que l'industrialisation avait aussi beaucoup d'aspects négatifs : la pollution de l'environnement, le stress dans la vie quotidienne, le pouvoir presque indéterminé des bureaucraties bien établies, que je viens de décrire, devenaient les grands thèmes du débat au niveau des intellectuels mais aussi au niveau de beaucoup de groupes de discussion, et surtout au niveau communal.

Le grand consensus de la période d'après-guerre n'existait plus. On commençait de plus en plus à interroger les politiciens établis sur les valeurs fondamentales de la société allemande. C'est dans cette situatio, que les initiatives de citoyens en Allemagne sont nées.

Bien sûr, le nouvel intérêt pour les affaires sociales à la base et aussi pour les questions écologiques n'était pas seulement un phénomène qui existait en Allemagne. L'ennui qu'on sentait vis-à-vis du système bureaucratique se faisait sentir aussi en France, en Angleterre, aux Etats Unis etc. Ce n'était pas un hasard que le mouvement des années 68 se déroulait pratiquement en même temps dans toutes les sociétés de l' Occident.

A côté des aspects structurels, il y a eu aussi l'influence de la guerre de Vietnam et la confrontation de plus en plus incontrôlable entre le bloc capitaliste et le bloc socialiste qui étaient à la base de cette accumulation.
 

Mais l'établissement des initiatives de citoyens était quand même un peu unique en Allemagne et cela surtout à cause de la forte décentralisation de la vie politique. Bien que la structure bureaucratique du système politique existait à tous les trois niveaux, donc au même qu'il était possible au niveau le plus bas, dans les communes, d'influencer les processus des décisions. Cela explique pourquoi les premières initiatives de citoyens en Allemagne sont nées dans les villages et dans les quartiers des grandes villes.

Elles s'occupaient tout d'abord des questions très concrètes de la vie de la population : Où faut-il avoir des jardis d'enfants ? Comment peut-on améliorer le système de santé au niveau communal ? De quelle manière peut-on régler la circulation de sorte que les enfants aient quand même assez d'espace pour jouer ? Ces questions et beaucoup d'autres étaient à la base de l'organisation et beaucoup de petits groupes de citoyens de toutes les couches sociales et toutes les tendances politiques pour changer la politique officielle. Et on a vu qu'il était possible au niveau communal et aussi au niveau des Etats fédérés d'y avoir une influence assez forte.

Un deuxième élément dur était très important dans l'explication c'est que l' Etat de droit en Allemagne est tellement fort qu'on a vite eu beaucoup de succès au niveau des tribunaux avec des démarches juridiques qui étaient entreprises par les initiatives des citoyens.

Le fait que le système judiciaire soit aussi fortement décentralisé a favorisé le succès des initiatives de base. Et c'est comme ça que la fondation pour un mouvement de citoyens encore plus fort, même au niveau fédéral, a été créée.

On peut maintenant comprendre pourquoi le mouvement écologique, bien que plus tôt établi en France, a eu beaucoup  plus de succès en Allemagne.

Les succès du début des années 70 ont encouragé les initiatives à tenter de nouveaux efforts vis à vis du système traditionnel. Les débats sur les stations nucléaires et les grandes manifestations contre la politique d'énergie du gouvernement allemand ont amené des millions de citoyens dans les rues qui sentaient que leur propre droit à la vie sera touché par la non-considération des aspects de base au niveau des acteurs traditionnels de la vie politique.

Les attaques de ces deux mouvements et de ces initiatives n'étaient pas seulement dirigées contre les partis traditionnels mais aussi contre les autres groupes d'intérêt qui existaient en Allemagne, donc les syndicats, les églises etc. qui étaient entre temps tellement établis qu'ils n'étaient plus capables de jouer un rôle de contre-pouvoir vis-à-vis des actions des politiciens.

C'est pourquoi on a commencé, à la fin des années 70, une discussion sur une autre forme de participation à la vie publique. On a compris qu'il ne suffit plus d'organiser la résistance en dehors du parlement, mais qu'il fallait bien influencer les processus au niveau des parlements mêmes.

Les deux problèmes suivants ont mené à ces discussion

(1)   le problème de catastrophe écologiques perçu comme inévitable à cause de la construction de beaucoup de stations nucléaires,

(2)   le niveau d'armement des deux blocs politiques à cette époque.

On a vu à travers les grandes manifestations à Bonn, à Berlin et à Hamburg qu'il ne suffit pas de mobiliser un ou même deux millions d'habitants de l' Allemagne contre la politique officille du gouvernement mais qu'il fallait jouer un nouveau rôle au niveau du système politique établi même.

A cette époque l'ancienne opposition parlementaire, les socialistes, était au pouvoir. On s'attendait au niveau des initiatives de citoyens, à une politique encore plus difficile pour elles au moment où les chrétiens démocrates prendraient le pouvoir.

C'est comme ça qu'on a crée le parti des verts et c'est ça qui a bouleversé complètement le système des partis politiques en Allemagne. Jusque là on connaissait trois partis politiques dont deux grands partis populaires – les chrétiens démocrates et les socialistes- et un plus petit parti libéral qui garantissait que toujours un des plus grands partis politiques avait en coalition avec lui une majorité confortable dans le parlement fédéral. Le parti des verts donc a été créé et a eu beaucoup de succès.

Encore une fois, le système fédéral et la forte décentralisation établissaient le cadre structurel, qui a fortement favorisé le succès des verts, et c'était d'abord au niveau des communes que les groupes parlementaires des verts ont joué un très grand rôle. Après ils étaient élus au niveau des Etats fédérés, et c'est seulement quelques années plus tard qu'ils ont pour la première fois aussi participé au pouvoir gouvernemental dans quelques Etats fédérés.

Ce développement a d'abord affaibli le mouvement et les initiatives de citoyens. A partir, des années 83/4 on a vu que le mouvement acceptait les anciennes structures de la République Fédérale d' Allemagne. On observait que le parti des verts est devenu un parti conventionnel comme tous les autres.

Comme au niveau des parlements et partis politique, on constatait la bureaucratisation des initiatives de citoyens au lieu des actions spontanées et d'une organisation ouverte, on a trouvé de plus en plus d'initiatives qui se sont formées en groupe d'auto-assistance et en groupe d'intérêt qui n'hésitaient même plus de prendre des fonds de gouvernement pour mener leurs actions. A partir de ce moment, on a trouvé des initiatives au niveau de la santé, au niveau de l'environnement, au niveau de l'organisation communale, on a vu des groupes qui s'occupaient de la création des nouvelles formes de jardins d'enfants, des groupes qui s'occupaient surtout des minorités comme les homosexuels ou les handicapés.

On voit aussi de plus en plus des initiatives de base qui travaillaient pour une information de la population sur la situation globale du monde. J'aimerais ajouter ici que la naissance de beaucoup de groupes qui s' occupaient de la problématique nord-sud a aussi eu lieu à cette époque.

Donc nous observons un processus de bureaucratisation et une forte structuration des initiatives de citoyens.

Il y a un autre aspect qui a renforcé la perte de dynamique des initiatives de citoyens, c'est l'échec des systèmes dans les pays de l'est. A un moment où l'avantage du système de marché devenait plus évident, il était difficile de critiquer le système politique en Allemagne d'une manière très radicale. Glasmost et Perestroika et plus tôt le mouvement Solidarité en Pologne et le mouvement Charte 77 en Tchecoslovaquie ont changé la perspective de beaucoup d'intellectuels en Allemagne et on mené à une réduction de l'esprit critique vis-à-vis de notre propre système politique.

Un autre facteur était très important. Les grands thèmes introduits par les mouvements de citoyens sont devenus des thèmes auxquels les partis politiques très bien établis, les syndicats, les églises et d'autres acteurs ont aussi réagi. Aujourd'hui l'aspect écologique n'est pas du tout une chasse gardée des verts. Tous les grands partis politiques de l' Allemagne ont un programme écologique, le gouvernement de Helmut Kohl était le premier gouvernement fédéral à avoir créé un poste de ministre de l'environnement et, en fait, on doit dire qu'aujourd'hui la législation concernant l'écologie en Allemagne est la plus avancée dans toute l' Europe.

Les traités de désarmement entre l' Est et l' Ouest ont aussi réduit l'esprit critique des grands mouvements de citoyens au niveau de la paix.

Les structures d'autoassistance et d'auto-organisation que j'ai déjà mentionnées au début sont aujourd'hui tellement bien établies et même bien articulés avec le système administratif officiel que beaucoup de gens s'engagent plutôt dans ces groupes que dans des mouvements spontanés de citoyens.

 2 - Structures et Mécanismes de Fonctionnement des Initiatives de Citoyens

Après avoir décrit le rôle que les initiatives de citoyens ont joué dans l'histoire de la République Fédérale d'Allemagne, il s'agit maintenant de mieux analyser leurs structures et la manière dans laquelle elles se distinguent d'autres acteurs qui sont actifs dans le jeu démocratique surtout les partis politiques.

La différence entre partis politiques et initiatives de citoyens est d'abord très visible au niveau de la composition de l'appartenance de leurs membres. A ce niveau, il y a surtout deux phénomènes qui sont assez frappants, à savoir le nombre des femmes et le nombre des jeunes, qui est beaucoup plus élevé dans les initiatives de citoyens.

Cela s'explique d'abord par la facilité d'accès aux positions importantes dans les initiatives de citoyens. Dans les partis politiques on est obligé de s'incliner à un long chemin d'activités marginales et peu fascinantes avant que l'on ait la chance de gagner une certaine importance. La bureaucratie démocratique est si bien élaborée dans les partis politiques qu'il est pratiquement impassible d'avoir un certain pouvoir de changement. Il faut se servir d'une bonne connaissance des statuts et des règles de jeu, formelles et informelles, avant qu'on soit pris au sérieux. L'hiérarchie, surtout dans les grands partis politiques populaires, qui ont entre 750.000 et 900.000 membres, est fortement accentuée, et il faut arriver aux plus hauts niveaux de décisions pour changer la plate-forme programmatique de ces partis. Cela demande beaucoup de temps, de moyens et surtout l'accès aux cercles informels qui constituent la base de pouvoir dans les partis politiques.

Cette approche est pratiquement impossible pour les jeunes gens qui n'ont ni l'expérience professionnelle ni les moyens financiers pour s'intégrer à ce très haut niveau.

En ce qui concerne les femmes, elles sont, même dans un pays comme l' Allemagne, tellement occupées par leurs devoirs au niveau des familles qu'elles ne disposent pas du temps, qui est nécessaire pour faire carrière politique.

L' idéalisme des jeunes et le fait, que beaucoup de femmes sont beaucoup plus confrontées aux problèmes quotidiens de la vie, sont encore d'autres raisons pour leur choix de s'engager plutôt au niveau des initiatives de citoyens, car réduisant leur très souvent à quelques problèmes bien définis et sans trop de complexité. Il n'est pas du tout nécessaire d'accepter toute une idéologie quelques fois lourde et bien élaborée si on s'engage dans le travail pour un nouveau jardin d'enfants, contre la construction d'une station nucléaire, pour le désarme ou contre l'exploitation des pays du tiers monde. Au niveau des partis politique, par contre, on est obligé de s'engager pour des positions qui ne sont d'aucun intérêt personnel ou que l'on ne partage même pas.

En plus, le travail dans les initiatives de citoyens laisse beaucoup plus d'espace à l'imagination et aux nouvelles méthodes de la lutte politique les procédures difficiles des partis politiques.

La forte idéologisation et les lourdes procédures bureaucratiques sont aussi la raison pour laquelle les églises et les syndicats, qui étaient à l'époque des contre-pouvoirs très importants, ont perdu beaucoup de membres actifs.
Depuis la naissance de mouvements de citoyens en Allemagne, on pouvait voir une relation réciproque entre l'engagement des jeunes et des femmes au niveau des partis et des initiatives. Et il est très intéressant, à cet égard, d'observer les efforts que les partis politiques entreprennent dans les dernières années pour devenir plus intéressants et attractifs surtout pour les deux groupes de la population, dont je viens de parler.

Une autre raison que beaucoup de gens donnent pour s'engager dans les initiatives de citoyens, se trouve dans le fait, qu'on peut s'engager sans directement prendre un engagement élargi, auquel on n'est pas préparé ni disposé.

Ils n'existent pas de carnets de membres ni de cotisations régulières. Il suffit, qu'on s'investisse avec un peu de temps, beaucoup d'imagination et surtout avec la forte volonté de n'attaquer qu' un seul aspect bien défini. Cela est très important, parce que ça laisse la liberté de ne pas s'engager au niveau d'un problème sur lequel on pourrait avoir une vision tout à fait différente de quelques uns, qui, au niveau d'une autre problématique, ont été des camarades de lutte. Cette liberté est bien appréciée, surtout chez les jeunes.

Néanmoins, il existe aussi des hiérarchies informelles au niveau des initiatives de citoyens.

Ils se constituent par des capacités théoriques, une connaissance spéciale d'un problème ou tout simplement par un engagement extraordinaire. La plupart des initiatives de citoyens ont, bien analysant le danger, trouve des moyens contre une concentration trop du pouvoir.

Et cela est devenu plus important après l'intégration des initiatives de citoyens en un parti politique, avec l' établissement des verts et avec le début à leur participation à la vie politique officielle en Allemagne. On a introduit de mécanismes comme la rotation des mandats, la limitation du temps de parole pendant les réunions ou la direction collective des initiatives de citoyens pour éviter l'existence, de trop de pouvoir individuel.

Un autre aspect important est le suivant : dans les partis politiques trouvent beaucoup plus de fonctionnaires de l' Etat, d'association professionnelles ou de syndicats pendant que les professions libres sont un peu plus engagées dans les initiatives de citoyens. Cela s'explique par deux facteurs.

D'abord, il est difficile pour un fonctionnaire de s'engager dans un organisme qui a d'office et par définition un caractère oppositionnel. Avec l'exception des professeurs, les employés de l'administration étatique ou d'organismes fortement liés à l' Etat hésitent de prononcer ouvertement leur mécontentement avec la politique officielle, bien que la loi fondamentale ne l'interdise pas. La loyalité par rapport à l' Etat ou à l' église ou aux syndicats est tellement intériorisée qu'il soit difficile pour ces fonctionnaires d'exprimer leurs propres idées librement. Cela est beaucoup plus facile sous le protectorat des partis politiques établis et protégés par leur forte liaison avec l'administration gouvernementale à tous les niveaux.

Deuxièmement, il existe le facteur de temps qui ne permet pas aux membres des professions libres de choisir le calvaire de trouver dans la vie publique avec un engagement particulier au niveau des questions qui sont bien liées à leurs compétences.

Les avantages des initiatives de citoyens étaient tellement visibles et attirants, qu'au début de leur existence beaucoup de membres des anciens contre-pouvoirs, donc pasteurs et laïcs engagé au niveau des églises, syndicalistes et des membres des partis traditionnels, qui ne se sentaient plus à l'aise dans leurs institutions, ont montré beaucoup d'engagement dans les initiatives des citoyens. Et très souvent on pouvait même observer un double engagement aux niveaux des initiatives de citoyens et au niveau des organismes traditionnels. C'est un facteur très important qui a aussi contribué au changement qu'on pouvait constater dans es organismes établis

Un dernier aspect, qui est bien important pour le fonctionnement des initiatives de citoyens est directement lié à la théorie politique. Il s'agit de la préférence pour les solutions consensuelles aux solutions par vote majoritaire.

Les initiatives de citoyens sont signifiées par un fort mécontentement vis-à-vis de la démocratie représentative, dans laquelle les décisions politiques se préparent et se font dans quelques cercles bien fermés et d'une manière peu transparente et moins accessible. On se méfie de l'influence croissante que les forts groupes de pression de l'industrie et de l' Etat même exercent dans les partis politiques, et on est décidé donc de montrer que les décisions politiques peuvent se faire avec beaucoup plus de transparence et ouverture à la population.

En plus, on est convaincu, que certaines questions qui touchent à la base de l'existence de l'humanité ne peuvent pas être décidées par une majorité à n'importe quel niveau. On se réfère à la théorie du primat de la vérité sur la majorité et on veut donc arriver à assez d'occasions que possibles pour une participation de toute la population aux décisions politiques.

C'est la raison pour laquelle la formation du parti des verts qui est porté par la majorité des initiatives de citoyens en République Fédérale d' Allemagne a provoqué beaucoup de discussions au niveau des initiatives de citoyens. Une grande partie des adhérents de ces initiatives s'est distancée de ce parti et est devenue beaucoup plus radicale, lorsque les verts ont pour la première fois gagné des sièges dans un parlement allemand.

Bien qu'on accepte aujourd'hui qu'une démocratie directe ne peut guère être organisée dans un pays comme la République Fédérale d' Allemagne, on garde toujours un esprit des discussions ouvertes et profondes. Et on cherche toujours d'abord un consensus avant qu'on passe aux urnes.

Cela implique très souvent un manque d'efficacité et une certaine lenteur au niveau des décisions, qui constituent un grand désavantage dans la concurrence avec d'autres partis politique. Néanmoins, on trouve que le principe d'efficacité est moins important que de trouver une fondation profonde et stable pour ses décisions.

Je veux résumer en énumérant encore une fois quelques faits de base :

  1. Il existe une forte participation des femmes et des jeunes dans les initiatives de citoyens.
  2. Les initiatives de citoyens ne connaissent pas les lourdes structures bureaucratiques comme les partis politique.
  3. Les professions libres sont plus, fonctionnaires moins engagés dans les initiatives de citoyens que dans les partis politiques.
  4. Les principes de consensus et de la vérité sont plus importants, au niveau des initiatives, de citoyens que les principes de l'efficacité et de la majorité.
  5. Les structures et les modes de fonctionnement des initiatives de citoyens ont un une forte influence sur l'organisation des partis politiques.


5. Modes d' Actions des Initiatives de citoyen.

J'ai déjà dit que l'imagination politique est presque illimitée au niveau des initiatives de citoyens. Mais si on regard leurs actions de proche, il ne s'agit que d'un usage très flexible de toutes les possibilités que la loi allemande donne au citoyen pour s'engager dans la vie publique. Et c'est surtout cette conformité avec la loi qui fait au début la force et le succès des initiatives de citoyens.

Ici je ne peux que décrire quelques exemples remarquables et significatifs pour cette manière de jouer le jeu politique d'une façon complètement différente que les partis politiques traditionnels.

Tout d'abord on utilise tous les moyens que l' Etat de droit donne aux citoyens surtout la juridiction administrative est utilisée jusqu'aux dernières instances. Pour ce faire beaucoup de cabinets d'avocats, qui eux-mêmes sont membres des initiatives de citoyens ont été établis et se sont spécialisés aux question qui sont importantes sur le mouvement. Très souvent ces avocats, défendent aussi des membres des initiatives de citoyens qui sont accusés devant un tribunal correctionnel à cause d'une action qu'ils ont menée pour lancer leurs initiatives. Les avocats sont souvent payés par des contributions que les membres des initiatives ont cotisées eux-mêmes.

Une autre manière très importante de s'engager c'est l'organisation et le financement des enquêtes scientifiques. Dans cette matière, ce sont surtout des sociologues, des pédagogues, des chimistes, des biologistes qui jouent un rôle important. Les expertises, qu'on fait et qu'on publie sont souvent une contrebalance très importante contre les positions publiées par l' Etat, ils enrichissent énormément le débat public. Il faut mentionner que beaucoup de ces actions sont organisées, menées et financées par les membres des initiatives de citoyens.

Un moyen très important pour créer une certaine ouverture du débat politique c'est l'organisation des "hearings" publiques, c'est à dire des forums dans lesquels des thèmes très importants comme la manipulation génétique, la construction des station nucléaires, la participation des soldats allemands aux actions de l' ONU, la position de la banque mondiale vis-à-vis du tiers monde sont discuté par les experts des différentes tendances, pour permettre à tous les citoyens qui sont intéressés dans la matière de faire un jugement plus valable.

Depuis la fin des années quatre-vingts, le mouvement des initiatives de citoyens dispose d'un journal qui s'occupe surtout des thèmes qui risquent d' être éliminés du débat de la politique officielle. La "TAGESZEITUNG" a été bien attaquée par ses concurrents traditionnels et par des hautes personnalité que se sentaient touchées et concerne par quelques révélations que le journal a faites. Mais entre-temps on a compris en Allemagne que la plupart des recherches de ce quotidien sont très  solides et professionnelles et qu'on ne peut guère ignorer, ses opinions. Dans les revues officielles de la presse les opinions de la "TAGESZEITUNG" ne manquent presque jamais. Il faut avouer, qu'au début on a eu plusieurs organes de la même tendance et que seulement une concentration du mouvement sur un seul journal a permis de survivre économiquement et de gagner du pouvoir politique.

Dans le journal on trouve aussi deux pages pour des messages personnels des membres du mouvement. Il y a par exemple des gens qui offrent d'amener d'autres personnes dans leur voiture quand ils vont d'une ville à l'autre en Allemagne. La petite contribution que l'on paye est beaucoup moins que le tarif pour le train ou pour un bus. Il y a d'autres qui cherchent une chambre dans un appartement dans une autre ville pour quelques semaines ou mois et d'autres qui en n'offrent. Ces bourses de voyages ou de loyer, sont très souvent beaucoup plus efficaces et moins chers que les systèmes officiels et ils permettent aussi aux membres des différentes initiatives de citoyens de mieux exercer leur travail. Mais ce qui est plus important, est que ces initiatives montrent par ses formes d'auto-organisation aussi une approche alternative à la vie, qui elle-même devient un élément important pour la défense des nouveaux intérêts politiques.

Bien sûr, on organise des manifestations, on écrit des pétitions, on organise des boycotts vis-à-vis de certaines action de l' Etat.

Un exemple pour ce genre d'intervention était le boycott du dernier recensement de la population au cours de l'année 86. On craignait fortement que le fait que les données de chaque citoyen se trouvent entre les mains à l' Etat pourrait renforcer le pouvoir du gouvernement et mener à un contrôle poussé de l'individu. Beaucoup d'initiatives de base ont montré une véritable résistance contre ce recensement, et à la fin, plus de 7% de la population ont refusé de donner les informations demandes par l' Etat. Cela a tellement falsifié les résultats qu'ils ne sont pas publiés jusqu'aujourd'hui.

Actuellement, nous avons en Allemagne une discussion sur les nouvelles formes de l'organisation de la vie politique. Les petites entités d'autoassistance et d'auto-organisation de la vie politique. Les petites entité d'autoassistance et d'auto-organisation deviennent de plus en plus importantes. On se méfie de grandes institutions et des groupes d'intérêts qui sont trop larges et pas du tour transparents.

Beaucoup de gens qui ont joué un rôle dans l'établissement du mouvement des initiatives de politiques suivent le rythme de cette discussion et de ces alternances montres, que l'influence des initiatives de citoyens n'est pas moins forte qu'auparavant, mais que seulement les méthodes ont changé, salon le défi que le changement au niveau des grands développements nationaux et internationaux pose.

6. Les Initiatives de Citoyens et  l'Etat

Bien sûr, chaque Etat doit être en état de se défendre. C'est pourquoi chaque initiative venant de la base doit nécessairement trouver une réponse des gouvernants. Surtout en Allemagne, qui a connu beaucoup de problèmes historiques pendant la construction de sa démocratie, la stabilité politique est devenue un élément que la majorité de la population, les sondages le montrent, considère comme très important.

C'est la raison pour laquelle les initiatives de citoyens doivent être considérées avec beaucoup d'attention. Ils doivent aussi accepter, qu'on les critique de la même manière qu'elles se permettent de critiquer l' Etat.

Ceci dit, il faut souligner que je regarde certains aspects dans le mouvement des initiatives de citoyens avec assez de réserves.

On a cru, à un moment donné, qu'on peut attaquer les décisions de l' Etat avec des méthodes violentes. Cela a fortement discrédité ces initiatives. Leur image ainsi que l'image du parti vert se sent beaucoup détériorée. On ne peut plus toucher, en Allemagne au principe du monopole d' Etat aux armes. C'est très important, d'autant plus que nous connaissons aujourd'hui des tendances de la droite fasciste qui se permet de mettre ce monopole en jeu.

Un deuxième aspect est basé sur ma conviction, qu'aucun Etat peut survivre sans uun consensus minimal sur les règles de jeu. A ce niveau je crois que certaines tendances vers une démocratie plus directe sont assez dangereuses dans un pays comme l' Allemagne. Qui peut organiser des référendums pour une population de 80 millions d'habitants ? Quelle sera la différence entre les lois qui ont passé le parlement et les lois décidées par la population ? Quelle est l'instance de révision ? Devant qui est la population, qui a décidé, responsable ? Nous connaissons assez de cas, où le peuple a décidé et à la fin personne ne voulait prendre la responsabilité. Je pense, que certaines tendances vers un. démocratie plus radicale qui se trouvent dans certaines initiatives de citoyens ne sont pas acceptables à ce niveau

La démocratie, l' Etat démocratique, demande une certaine continuité, qui de sa part demande des structures permanentes. Le modèle des initiatives de citoyens n'est pas à généraliser donc pour tous les niveaux de la politique dans un Etat démocratique.

La participation à la vie politique demande une certaine expérience et aussi l'indépendance des politiciens. On ne peut pas, à la longue, seulement compter sur les réflexe spontanés que l'on a prises, même si le thème ne trouve pas l' intérêt direct de la population. Et si on veut éviter la démagogie des dictateurs, qui ne voient que leurs propres intérêts, et aussi l'auto-exploitation des acteurs politiques, on doit donner assez de sécurité et assez de moyens financiers aux politiciens afin de leur permettre de gagner plus d'expérience et de rester indépendants de toute menace de corruption.

A tous ces niveaux il faut bien critiquer certaines positions de verts et de certaines initiatives de citoyens qui vont dans la même direction.

Mais je crois, qu'en général, on ne trouve plus ces positions radicales, et les idées ainsi que les actions des initiatives des citoyens sont devenues bien acceptables pour tous les acteurs politiques en Allemagne .Le fait ,que même  les chretiens-Democrates ,donc le parti du centre ,commencent à refl